Mon enfant ne veut rien manger

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Quand un enfant ne veut rien manger, ou est très sélectif dans ses préférences (des pâtes…) et que l’on a mis du temps à préparer des repas variés, la situation est loin d’être simple !

C’est un moment qui devrait être plaisant et pourtant le repas peut vite virer à la dispute, aux luttes de pouvoirs, à la déception, au chantage et aux pleurs. Bref un enfer au quotidien.

Pour comprendre le phénomène dans toutes ses dimensions, j’ai interviewé Aurélia Perrin, orthophoniste.

Cette interview est découpée en 3 épisodes :

Episode 1 : Comment l’enfant développe peu à peu son répertoire alimentaire

Episode 2 : Les freins qui peuvent empêcher des repas variés et sereins (à paraitre semaine prochaine)

Episode 3 : Les outils pour débloquer les situations et accompagner les enfants (à paraitre dans 2 semaines)

Episode 1 : Comment l’enfant développe peu à peu son répertoire alimentaire

Cliquez sur la flèche tout en haut de l’article pour écouter l’interview en podcast (audio)

Retranscrition écrite pour ceux qui préférent lire :

Marie : Bonjour aujourd’hui sur le blog Secrets de Nutritionniste, j’ai le plaisir d’accueillir Aurélia Perrin qui est orthophoniste pour le thème ‘Mon enfant ne veut rien manger ‘.

C’est un premier épisode sur les 3 qui seront proposés les semaines suivantes.

Jingle : Titi Boyé

Marie : Donc aujourd’hui j’accueille Aurélia Perrin, orthophoniste sur le blog Secrets de Nutritionniste, pour nous parler des enfants qui ne veulent rien manger dans leur assiette. Aaaah quel problème des parents : les enfants qui ne veulent rien manger de leur assiette, qui ne veulent que des pâtes !

Donc là, on va creuser le sujet avec Aurélia sur 3 épisodes de podcast pour vraiment faire le tour du sujet, donc Bonjour Aurélia !

Aurélia : Bonjour Marie !

Dès les tout premiers jours

Marie : Aurélia, je vais te laisser la parole sur le sujet déjà du petit enfant en fait, de son environnement notamment alimentaire. Je vais te laisser nous expliquer comment cela se passe notamment dès les tout premiers jours, on peut dire cela Aurélia?

Pendant la grossesse

Aurélia : Alors oui effectivement dès les tout premiers jours et même in utero quand l’enfant est encore dans le ventre de sa maman, il commence déjà à découvrir certains goûts, et à entraîner son alimentation.

Donc il commence à découvrir les différents goûts parce qu’il déglutit le liquide amniotique dans lequel il baigne. Et que par le biais de ce liquide amniotique, il va découvrir les premiers gouts et les premières odeurs en lien avec ce que la maman mange pendant sa grossesse.

Pour le développement de l’Alimentation chez les tout-petits, il y a plusieurs éléments qui rentrent en compte et qui sont tous complémentaires les uns des autres :

-toutes les capacités motrices : donc les mouvements que l’enfant est capable de faire

-tout ce qui est sensoriel : les goûts, comment il perçoit les aliments

-et puis il y a tout ce qui est environnemental, de l’ordre des différentes explorations que peut faire l’enfant

Marie : Donc on va voir ces 3 aspects avec toi Aurélia, par rapport aux goûts de l’enfant qui arrivent tout petit. Je voulais juste te poser une question pour la grossesse. Est-ce qu’on peut inciter les mamans à faire attention à leur alimentation pendant la grossesse et à essayer de varier un maximum l’équilibre alimentaire pour que ce soit favorable à l’enfant, une fois qu’il nait et qu’il va manger des vrais aliments. Qu’est ce que tu en dis?

Aurélia : Alors au niveau vraiment diététique, je te laisserai te prononcer sur la question ! Après effectivement au niveau des goûts, plus la palette des goûts auxquelles l’enfant a été confronté est large, plus il aura de facilité à accepter différents goûts par la suite dans sa propre alimentation.

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Marie : D’accord

Allaitement maternel : un panel de goût ! mon enfant ne veut rien manger
Allaitement maternel : un panel de goût pour avoir moins de refus lorsque l’enfant ne veut rien manger !

La bouche

Aurélia : Alors au niveau de tout ce qui est moteur, l’enfant commence dès la naissance à avoir le réflexe de déglutition , et déjà in utero il est déjà capable d’avaler. Et puis quand il nait, dans les tout premiers mois, où il a une alimentation uniquement lactée (donc soit par le lait de la mère s’il est allaité, soit par le lait artificiel), il a besoin d’avoir un mouvement de bouche qui lui permet de se nourrir. Donc une praxie de succion, un mouvement de succion, qui n’est pas le même quand on est allaité et quand on est au biberon.

Pour ce qui est de la diversification alimentaire plus tard, qu’on soit allaité ou en lait de synthèse, il n’y a pas vraiment de conséquence. C’est à dire qu’on peut avoir été allaité artificiellement au début et avoir une alimentation correcte et convenable dans l’enfance. Il n’y a pas de relations de cause à effet. Mais malgré tout, quand il y a un allaitement maternel, le goût des aliments que la maman mange, passe aussi dans le lait maternel. Cela permet quand même d’avoir une variété de goûts qui est beaucoup plus vaste dans les premiers temps et donc de commencer à former plus ou moins le palais de l’enfant dès les premiers temps.

La praxie de succion

Aurélia : Alors on pose toujours la question de savoir si effectivement l’enfant a été allaité avec du lait maternel ou s’il a été au biberon. Pour le goût, mais aussi par rapport à la praxie. Parce que la praxie de succion, quand l’enfant est au sein, elle est beaucoup plus complexe et beaucoup plus complète aussi que la praxie quand l’enfant il est au biberon. Parce que sur la tétine de biberon, l’enfant il a juste à avoir une espèce de mouvement de pinces en fait, en haut, en bas. Alors que quand il est au sein, pour extraire le lait du sein de la maman, le mouvement est beaucoup plus complexe, il y a plus un mouvement de rotation et en général c’est meilleur aussi pour pouvoir passer ensuite à la cuillère, pour ensuite pouvoir avoir une mastication qui soit efficace et se débrouiller avec toutes sortes d’aliments. Donc on cherche aussi à savoir s’il y a eu des difficultés quand un enfant a été mis au sein ; il y a certains enfants qui ne trouvent pas le geste ou quand l’enfant a été mis sur un biberon, savoir aussi au niveau de plus de la coordination des mouvements, comment les choses se sont passés.

Marie : D’accord.

Le passage à la cuillère

Aurélia : Donc là c’était plus sur la partie 0 – 4 mois où l’alimentation est quasiment exclusivement lactée. Selon les périodes ça peut être 0 – 6 mois, ça dépend un peu des modes pédiatriques, puis à partir de 4 mois ou 6mois, selon les périodes, on commence le passage à la cuillère où on commence à proposer aux enfants les compotes de fruits, les purées de légumes, alors évidemment sans sel, sans sucre avec juste du fruit ou juste du légume. Et au niveau des mouvements, c’est le moment où l’enfant passe d’une technique de succion à réussir à récupérer ce qui est sur la cuillère. Il garde malgré tout au niveau de la langue ce mouvement d’avant en arrière un petit peu comme il fait quand il tète. C’est les premières périodes où il commence à bavouiller  un peu partout quand on leur met la cuillère dans la bouche.

Texture avec morceaux : mon enfant ne veut rien manger

Et ensuite, vers 9 – 12 mois, on commence à passer à des aliments avec un peu plus de texture, qui sont mixés et dans lesquels il peut y avoir des petits morceaux mous. Là ils ont besoin encore d’affiner les mouvements d’écrasement au palais, où ils peuvent plus simplement faire que téter. Petit à petit les mouvements vont devenir un peu plus complexes et ils vont affiner tout leur répertoire de mouvements pour réussir à mieux se débrouiller avec ce qu’ils ont dans la bouche.

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Marie : D’accord c’est des fois un petit passage difficile pour les enfants, pour les parents, le passage à la cuillère, plutôt aux morceaux… J’avais dans la question l’idée, parce que les morceaux c’est quand même assez impromptu, de passer de la purée aux morceaux, ça ne se fait pas toujours facilement et des fois, il y a des blocages plus ou moins importants. Est-ce que tu aurais un petit indice à nous donner sur ce passage aux morceaux ?

Aurélia : Effectivement quand on a des enfants qui ont des difficultés au niveau de l’alimentation, c’est souvent dans ces premières étapes-là qu’on voit les premières ruptures on va dire. Donc certains enfants soient qui refusent même la cuillère, qui veulent continuer de téter et qui n’acceptent pas la cuillère, soit des enfants qui recrachent les morceaux ou qui n’acceptent pas, qu’ils rejettent ou qui ont des haut-le-cœur.

Plats industriels versus fait-maison

Alors il faut aussi faire la part des choses entre certains plats industriels du commerce où en fait on a une texture qui est vraiment purée ou un peu liquide avec des vrais morceaux dedans, on se demande un peu ce qu’ils font là ! C’est très hétérogène en fait, comme texture, et les choses qu’on peut faire à la maison où simplement en mixant, on mixe un petit peu moins et du coup ça devient un petit peu plus granuleux, mais c’est quelque chose qui reste assez homogène. Et c’est vrai que dans les premières textures où il commence à y avoir un peu plus de morceaux, il vaut mieux avoir quelque chose d’homogène qu’une texture vraiment lisse avec des morceaux qui se baladent dedans. Parce que l’enfant déjà est moins pris au dépourvu, parce que s’il est sur une texture lisse il va continuer à faire comme il a l’habitude et il va se dire « mais qu’est-ce que c’est que ce truc-là qui arrive dans ma bouche tout à coup auquel j’n’ai pas été préparé », alors que si on épaissit un peu ou qu’on mixe de moins en moins, les choses se font plus progressivement et en général c’est mieux accepté.

Donc la période « mixé et solide mou » c’est 9 – 12 mois, et ensuite on continue d’avancer. 12 — 18 mois on a toujours ces solides mous. Les solides mous ça va être, par exemple, un petit morceau de banane, ça peut être des pommes de terre cuites à l’eau, des carottes cuites à l’eau, des choses qui peuvent s’écraser au palais avec la langue, en fait.

Les textures à croquer

Et à partir de 12 – 18 mois on commence à introduire les solides durs. Donc les solides durs, ça peut être, par exemple, un petit biscuit, petit beurre ou quoi, qui est dur, où il y a besoin de croquer, mais qui est assez friable et qui se ramollie assez facilement aussi. Évidemment on évite la rondelle de saucisson, le morceau de viande, tout ce qui n’est pas encore possible ne serait-ce que par rapport à leur dentition.

croquer des fruits de saison miam !
croquer des fruits de saison miam !

Et au-delà de 18 mois, on mange, on va dire pas comme les adultes, mais en tout cas au niveau des textures, on peut passer à peu près toutes sortes de texture. Et en général sur cette période-là jusque-là les enfants acceptent à peu près tout ce qu’on leur propose. On s’enthousiasme quand on voit que le petit pot d’épinards, il passe super, les brocolis ils adorent ça, ils en redemandent… En général les aime bien tout, jusque-là il n’y a pas trop de difficultés. Et la hiérarchie des textures qu’on apporte petit à petit, ça correspond aussi au développement moteur des capacités de l’enfant. Il y a, au début, une bouche sans dents et une petite langue et petit à petit une lampe qui se muscle un petit peu, les premières dents qui apparaissent et les mouvements qui deviennent plus fluides, plus fins, et ils arrivent mieux à coordonner tout ça. Ça, c’est vraiment tout le développement moteur et les différentes textures qui évoluent en fonction du développement moteur d’un enfant.

Marie : D’accord. Ça ne dépend pas uniquement du développement des dents, ça dépend aussi de la motricité finalement de tout le reste du corps qui va maturer, qui va évoluer par rapport à ça et du coup ça se passe pareil dans la bouche. On voit très bien l’extérieur de notre enfant qui change, on peut ici imaginer que l’intérieur de sa bouche change pour accepter de mieux en mieux les choses. D’accord donc ensuite on continue vers la partie sensorielle.

Il met tout à la bouche !

Aurélia : On en a déjà un petit peu parlé, parce qu’au niveau sensoriel il y a les goûts, mais les textures il y a un aspect sensoriel aussi. On n’a pas la même sensation sur du lisse et sur du morceau. Au niveau de ce dont on parlait juste avant par rapport au mouvement, c’est important aussi que les enfants puissent passer dans leur bouche des choses qui ne soient pas alimentaires, donc le hochet, les anneaux de dentition… ils le font en général spontanément. C’est leur premier moyen d’explorer le monde, la bouche, et c’est très important qu’ils ne fassent justement, qu’ils puissent mettre toute en bouche même si nous, des fois, ça nous fait un petit peu peur parce que tout n’est pas très propre. Mais c’est vraiment important qu’ils aient cette phase pour développer justement leur motricité et aussi leur sensibilité aux différentes textures, à des choses dures, à des choses molles, rugueuses, lisses…

aliments de l'enfance photot de colin-maynard-unsplash
Mettre des objets à la bouche-
photo de colin-maynard-unsplash

Manger tout seul

Marie : Il y a juste une chose, je pense que tu en parleras plus tard, mais je veux la poser-là parce qu’on en parle : à quel moment on les laisse mettre les doigts dans l’assiette tout seul ?

Aurélia : À quel moment on les laisse mettre les doigts dans l’assiette ? J’ai envie de dire dès qu’ils ont envie d’y aller, même si ça ne va pas faire plaisir aux mamans qui aiment bien des fois que les choses soient bien propres, etc. Mais s’il a envie de mettre les doigts dans la purée pour voir comment c’est et remettre dans sa bouche derrière, c’est important de laisser mettre les doigts dans la purée et dans sa bouche derrière.

Marie : Toi, en tant que professionnelle tu dis : il faut.

Aurélia : Oui, il faut.

Marie : Il faut les laisser faire, vraiment.

Aurélia : C’est important, oui. Parce que c’est toutes les expériences sensorielles dont ils ont besoin et quand il y a des blocages des fois au niveau alimentaire, ça peut être un blocage sensoriel plus large finalement. Donc oui, c’est important qu’ils fassent ces expériences-là. Après des choses, ça se lave, une serviette, ça se lave, des vêtements, ça se lave… Voilà, ce n’est pas le plus important.

Attirance pour le sucré et le gras

Au niveau des goûts ; donc du sensoriel on était plus sur le tactile et là on vient un peu plus sur les goûts. Spontanément, à la naissance le bébé est attiré par tout ce qui est sucré et gras, donc typiquement le goût du lait. Et il rejette tout ce qui est amer parce que ça n’a rien à faire dans son alimentation à ce moment-là, c’est aussi un mécanisme défense pour ne pas être empoisonné.

Puis petit à petit il va découvrir le salé comme goût suivant, alors on est quand même après 24 mois on ne met jamais de sel dans ce que l’on prépare pour un enfant et même dans les pots industriels normalement il n’y en a pas. Et une fois qu’il aime de base le gras et le sucré, ensuite il se met petit à petit au salé, puis commence à accepter ce qui est acide et ce qui est amer. Donc c’est normal si un enfant goûte quelque chose qui acide ou amer et qu’il fait la grimace, c’est parce que ce n’est pas quelque chose qu’il est censé apprécié à cet âge-là et ça va venir plus tard dans son répertoire.

il a quel goût ce petit pied ???
il a quel goût ce petit pied ???

2 ans : mon enfant ne veut rien manger

On avait dit avant que jusqu’à 18 mois en général, ils acceptaient tout assez facilement, et c’est au-delà de 24 mois qu’on commence souvent avoir des difficultés avec des enfants qui aimaient bien tout, qui goûtaient tout et qui deviennent difficiles.

Néophobie alimentaire

Alors ça correspond aussi à leur phase de développement des 2 – 3 ans, moi je dis c’est la petite adolescence des enfants, parce que de toute façon c’est moi tout seul et vous je ne veux pas en entendre parler, donc ils ont besoin de s’affirmer dans l’alimentation aussi. Ça correspond à la phase d’opposition, c’est la phase où ils deviennent un peu plus difficiles et c’est une phase aussi où ils peuvent refuser tout ce qui est nouveau, parce que c’est inconnu et qu’il y a une appréhension et que de base ils vont dire « non, je n’en veux pas ».

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Donc qu’il y a une phase normale où l’enfant est plus difficile en général après 24 mois, le maximum c’est vers 3 – 4 ans et normalement ça régressent au-delà de 7 – 8 ans quand tout se passe bien et qu’ils passent juste cette petite phrase sans encombre. On verra plus tard, mais une des erreurs a pas commettre, c’est de restreindre les choses qu’on lui propose à ce moment-là où lui c’est tout «  non, je n’en veux pas » ce qui est important pour les parents, c’est de garder le cap et de continuer de proposer des choses variées même s’il n’aime pas, proposer une fois, deux fois, trois fois et de ne pas dire « ça il n’aime pas, donc j’en fais plus » et de restreindre petit à petit les choses qu’on lui propose.

Marie : On peut donner — le terme est technique — la phase où vraiment l’enfant dit « non » et ne veut rien de nouveau, c’est la néophobie alimentaire qui se passe entre 2 et 7 – 8 ans à peu près, qui peut arriver, qui peut ne pas arriver aussi, finalement, mais qui arrive quand même souvent dans la plupart des cas. Il y a ce petit passage où il faut dire « non », comme tu disais tout à l’heure.

Différentes carottes

Il faut passer par ces choses, on en parlera aussi tout à l’heure, je pense. Un enfant si on lui présente des carottes cuisinées d’une façon et que la semaine d’après on lui propose des carottes cuisinées d’une autre façon pour lui, ce sont deux plats complètement différents. Et il aura beau aimer les carottes cuisinées d’une façon, ce n’est pas obligés qu’il dise « oui » aux carottes cuisinées d’une autre façon. Ce sera vraiment différent pour lui et ça, c’est une perception qu’on doit avoir en tant qu’adulte que pour lui ça va être pas facile d’accepter tous les plats différents et cuisinés différemment. Je te laisse continuer sur la partie exploration.

Aurélia : Alors on en a déjà un petit peu parlé, comme tu disais c’est vrai que, par exemple, les carottes si elles sont rappées et froides ce n’est pas pareil que si elles sont en purée et chaudes, parce que notamment au niveau des sensations, la texture n’est pas la même quand c’est cru et rapé, et quand c’est en bouillie et chaud, le goût n’est pas le même non plus, l’assaisonnement n’est pas le même : donc en fait tout est différent même si l’ingrédient en base est le même.

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Exploration par les 5 sens

Effectivement au niveau des explorations pour l’alimentation tout est important.

les 5 sens sont sollicités

Les cinq sens — l’ouïe, un peu moins, à par à la limite quand quelque chose est croustillant, qu’on entend, mais ça y participent peu — par contre la vue est importante quand on a quelque chose dans l’assiette, ça peut être délicieux, si ça ressemble à une grosse bouillie informe, on n’a pas trop envie de s’y mettre. Donc le fait de bien présenter ça peut être aussi des fois une astuce pour certains enfants qui ne veulent pas trop manger.

L’odorat c’est aussi important quand l’enfant passe à table alors qu’il était en train de faire complètement autre chose dans une autre pièce et qu’on lui dit « maintenant tu viens, c’est l’heure de manger » et il n’a pas eu les odeurs qui sont venues exciter un petit peu ses papilles. Préparer son cerveau au fait qu’il y a le repas qui va arriver, et ça peut aussi le gêner et faire qu’il n’ait pas envie, finalement, de manger. C’est important que l’enfant ne soit pas trop loin de la zone où on prépare à manger pour qu’il puisse déjà s’imprégner et que son cerveau puisse se préparer au repas qui arrive. Donc l’odorat c’est aussi important.

Le toucher, ça peut être avec les mains, mais c’est aussi avec la langue, avec le palais, avec les lèvres… on n’a pas les mêmes sensations dans la bouche selon ce qu’on mange. Puis le goût, évidemment. Tous ces sens-là sont vraiment importants et si on a une altération d’un sens, qu’il y a un sens qui est trop développé ou trop peu développé, ça peut gêner aussi l’alimentation. On le reverra dans les freins qui peuvent causer problème pour l’alimentation des enfants, mais c’est important d’avoir en tête qu’il n’y a pas que le goût quand on mange, qu’il y a vraiment tous les sens qui participent. Comme on disait aussi tout à l’heure, la bouche c’est vraiment le premier canal d’exploration du monde jusqu’à 12 ou 18 mois. La bouche est plus sensible que la main chez le bébé et tout est appréhendé par la bouche. On y revient, mais c’est important qu’il puisse mettre en bouche le bout de sa manche de pyjama, le petit coton qui était à côté de lui sur la table à langer et qu’il puisse faire ces expériences-là pour que ses sens se forment et se développent.

Textures et températures

Au niveau sensitif, on l’a vu un petit peu dans les possibilités motrices, il y a tout ce qui est texturé : les textures lisses, les textures épaisses, quand c’est fluide, quand c’est avec morceaux, sans morceaux, et selon les aliments, il y a des aliments qui apparaissent un peu plus râpeux sur la langue que d’autres ; donc tout ça, c’est aussi des choses qui ont besoin d’être acceptées par l’enfant pour qu’il puisse manger des choses très variées. Et les températures, il y a certains enfants qui n’acceptent que des aliments froids ou que des aliments chauds ou pour nous ce sera chaud, pour eux ce sera brûlant, ou quand on mange une glace, ce n’est pas possible parce que c’est trop froid, ça les agresse. Il y a aussi toute la variété des températures qui vont entrer en jeu. Il y a toutes ces choses-là qui ont besoin d’être développées pour que l’alimentation puisse être la plus variée possible, selon les habitudes de la famille, selon la culture, selon l’endroit du monde où on vit parce qu’on ne mange pas la même chose en Inde qu’en France, par exemple.

La variété des aliments proposés

Il y a vraiment tous ces aspects-là qu’il faut développer. Puis proposer des aliments le plus variés possible en sachant pour qu’un aliment soit apprécié, il y a vraiment plusieurs étapes successives. Déjà on va le regarder, on va voir l’aliment, on va le sentir. S’il y a quelque chose qui a une mauvaise apparence, je pense par exemple, à une viande qui a des couleurs des fois on dit « celle-là à mon avis, ce n’est pas le moment de la manger », l’odeur ça nous renseigne aussi. Le toucher que ce soit par les mains quand c’est des aliments le plus souvent secs, ou par la bouche, le goûter, le mâcher, parce qu’il y a certains enfants qui acceptent de mettre en bouche, mais quand on mâche, ce n’est pas les mêmes saveurs qui se dégagent, donc c’est encore une étape successive. L’avaler et la dernière étape l’apprécier. Sachant qu’il faut souvent manger un aliment de nombreuses fois avant de savoir se prononcer et se dire « oui je l’aime bien ou non je n’aime pas », parce qu’à partir du moment où c’est nouveau, il faut le temps qu’on se fasse un peu notre opinion.

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l'important c'est de goûter !
l’important c’est de goûter !

Face à un enfant qui ne veut rien manger : Patience !

Marie : J’avais juste une question quand tu as parlé de température tout à l’heure, les descriptions que tu as faites des températures froides ou chaudes qui nous paraissent, à nous, chaudes ou tièdes et qui à eux vont paraître… l’idée qui m’est venue en tête le plus spontanément, c’est que les parents vont avoir besoin de beaucoup de patience.

Aurélia : Oui, parce qu’en plus quand on a une fratrie, chaque enfant est différent, donc peut-être le plus grand il va préférer les aliments bien chauds, le plus petit va préférer comme c’est tiède, il y en a un qui aimera plus les légumes, l’autre n’aimera pas trop… donc oui, c’est de la patience et c’est un apprentissage. C’est-à-dire qu’on n’est pas au restaurant, on n’est pas à la carte et dans tous les cas il faut un peu tenir la barque et proposer la cuisine de la famille. Les enfants vont cheminer petit à petit et il y aura des choses qu’ils n’aimeront pas, ils ont le droit de ne pas aimer certaines choses, il y aura des choses qu’ils aimeront… C’est un apprentissage. L’important c’est de goûter, de réessayer et d’avoir des choses assez variées au menu pour que chacun puisse y trouver son compte. Voilà, donc là je vous ai redonné les différentes étapes et les différents éléments qui sont importants pour que l’alimentation soit variée au niveau des goûts, des textures, des températures… enfin pour que l’enfant puisse accepter un maximum d’aliments et pouvoir avoir un régime alimentaire le plus sain possible.

Marie : Alors nous avons terminé ce premier épisode, Aurélia. Nous enchaînerons sur un deuxième épisode de podcasts où nous allons voir les freins qui peuvent empêcher des repas variés et sereins. Parce que ça peut ne pas tout à fait se passer comme on peut l’imaginer.

2 thoughts on “Mon enfant ne veut rien manger

  1. Original et intéressant d’avoir à la fois le point de vue d’une nutritionniste et d’une orthophoniste ! Bravo pour cet épisode, qui rappelle, entre autres, fort justement qu’il faut laisser l’enfant faire ses expériences.

    1. Oui peu de gens vont penser à un bilan avec l’orthophoniste en cas de trouble de l’oralité et pourtant ! (voir suite dans épisode 2 !)

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